mercredi 11 mars 2015

Les Moulins, ces "Géants" des Açores

Don Quichotte passe pour un illuminé ! Il se bat contre les moulins à vent qu'il prend pour des géants envoyés par de méchants magiciens.

La bataille des Moulins (extrait du roman de Cervantes)

"- Quels géants ? demande Sancho Panza
- Ceux que tu vois là-bas, lui répondit son maître, avec leurs grands bras (...)
- Prenez donc garde, répliqua Sancho, ce que nous voyons là-bas ne sont pas des géants, mais des moulins à vent, et ce qui paraît être leurs bras, ce sont leurs ailes, lesquelles, tournées par le vent, font tourner à leur tour la meule du moulin !"

Don Quichotte, sûr de la victoire, n'aurait-il pas promis à Sancho (dont je me sens proche) un hypothétique Archipel à gouverner ?
Ne serait-ce pas par hasard celui des Açores ?


Les Moulins de São Miguel et de l'Archipel.


Moulin à eau de Ribeira dos Caldeirões

A São Miguel

Pourquoi voit-on des moulins à vent à Ginetes, Bretanha ou à Capelas et pas à Ribeira Grande et à Agua de Pau ?
A l'inverse, pourquoi des moulins à eau à Ribeira Grande et à Agua de Pau et pas à Bretanha ou à Ginetes ?
Reportons-nous à la position spécifique des moulins dans l'île, entre le XVè et le XXè siècle, qu'ils soient à bras ou à manège, à eau ou à vent, voire à essence.


Moulin à bras

Il est nécessaire ici de connaître un peu le relief, l'hydrographie de l'île et l'évolution de sa population pour comprendre l'implantation de ces moulins, principalement à eau et à vent.


On distingue dans l'île de São Miguel, par ordre d'introduction, des moulins mus tout d'abord par la force des bras, ou animale, puis par l'eau, le vent, la vapeur et pour finir, l'éolienne.


Moinho Atafona



 
Moinho Azenha à Furnas
Après les "Moulins à Sang" (Atafona en portugais), brièvement évoqués, sont apparus deux types de moulins à eau : l'Azenha (moulin à aube) placé sur un cours d'eau et le Rodizio (fonctionnant grâce à une roue horizontale située en contre-bas dans une sorte de cuve ou bassin appelé "Cabouco") alimenté par une levada (canal artificiel) servant à son alimentation en eau.

Moinho Rodizio
Levada











Ces moulins à eau ont été édifiés selon un tracé approximatif Nord/Sud (Ribeira Grande/Agua de Pau) du fait de la présence de sources et de rivières plus abondantes et propices à leur bon fonctionnement.
Le Comte de Ribeira Grande en avait le monopole. 14 de ces moulins furent construits à intervalles irréguliers entre les Paroisses da Matriz et celle de Conceção. Seuls deux d'entre eux fonctionnent encore aujourd'hui.
Ces moulins étaient bâtis sur 2 niveaux. La partie meulage, comprenant parfois 3 ou 4 meules, donnait sur la rue. Le meunier habitait la partie supérieure.

Moulin à grains de
Ribeira do Guilherme

De nos jours, les moulins à eau de Ribeira das Caldeirões et celui du parc de Ribeira do Guilherme (...) continuent de fonctionner pour le plus grand plaisir des visiteurs. 













Le même, restauré en 2012


Moinho Vermelho à
Adjuda da Bretanha (2011)
Quant aux moulins à vents, disons seulement que la coupole de ceux que l'on connaît dans les îles dénote une influence hollandaise, voire anglo-suédoise (selon l'étude d'Ernest Vega de Oliveira). L'appareillage serait, lui, d'origine portugaise continentale selon un procédé postérieur au XVIIIème (d'après Rui de Souza Martins).
A Graciosa, Santa Maria et São Miguel, par exemple, la coupole se déplace pour accompagner le vent.
Moulin de Pico
A Faial et Pico, c'est le corps du moulin en bois qui tourne sur la roue de pierre qui lui sert d'assise.








Le pain ayant toujours été la base de l'alimentation ("Donnez-nous notre pain de ce jour"), sans moulin, pas de farine et sans farine, pas de pain.
Le moulin s'avérait être un maillon indispensable d'une chaîne, partant de la céréale cultivée sur place jusqu'à la fabrication du pain servi à table.

Marquis de Pombal

Aux Açores, à partir de 1474, seuls les Capitaines Donataires étaient en droit de posséder des moulins.
Ce monopole fût battu en brèche trois siècles plus tard, vers 1765, par le futur Marquis de Pombal, homme politique portugais (1699-1782).
Mais il faut attendre 1846 pour que ce monopole nobiliaire soit définitivement aboli, donnant ainsi à des particuliers la possibilité d'en posséder un.




Le premier connu de ces moulins à vents apparaît sur l'île de Terceira, vers 1611, suivi d'un autre spécimen à Santa Clara (île de São Miguel) en 1633 et en 1678 sur l'île de Faial.

Ces moulins connurent leur apogée à la fin du XIXème siècle.

Jusqu'en 1911, existaient dans le District de Ponta Delgada 38 moulins à eau côté Est, 45 moulins à vent côté Ouest et 2 moulins à moteur à explosion et 1 moulin à vapeur (minoterie). 

Notre village d'Algarvia, lui aussi, a possédé sa minoterie qui fonctionnait à l'aide d'un moteur à essence. Celle-ci, disparue depuis une trentaine d'années, est aujourd'hui devenue le Bar-Epicerie "Café Sonho do Norte" tenu par Carlos et Belmira.










Sur le Planalto dos Graminhais qui domine Algarvia, un champ d'éoliennes a vu le jour en 2011. Elles sont susceptibles de produire 10 % de l'énergie électrique de l'île.

 "Géants" des temps modernes





Moulins des autres îles







"Meunier, tu dors, ton moulin, ton moulin va trop vite.
Meunier, tu dors, ton moulin, ton moulin va trop fort.
Meunier tu dors... sous le vent des Açores".


Et pour finir, un petit diaporama musical
Cliquez sur le lien ci-dessous


Les Moulins des Açores




Source : Mario Moura - Article paru dans l' Açoriano Oriental le 18 avril 2012
intitulé "Razões dos Moinhos de São Miguel".



Texte et traduction (portugais/français) réalisés par Esop
Mise en page texte et photos par May












dimanche 8 mars 2015

Algarvia (Nordeste) Açores

Vue sur notre maison et les montagnes 


Nous voici donc installés dans le village d'Algarvia depuis le 12 décembre 2014, pour notre plus grand plaisir, car notre nouvelle maison est très agréable, conviviale et bénéficie d'un cadre superbe ! Nous avons également un très joli jardin planté de quelques orangers, goyaviers, poiriers et un pêcher.


Vue depuis la maison


L'accueil des habitants et commerçants fût aussi chaleureux que lors de notre arrivée il y a un an à Ribeira Chã.
Chacun y va de son petit mot gentil, ou de son aide pour faciliter notre intégration.





La Municipalité (Concelho) de Nordeste doit vraisemblablement son nom à sa situation géographique. Cette zone, sujette aux vents du Nord est le point de mire des navigateurs venant de l'Est.
Farol do Arnel


Elle fût élevée au titre de "Ville" le 18 juin 1514, année du décès à Blois de la Duchesse Anne, Reine de France (9 janvier 1514).
Sa position stratégique sur la route entre l'Europe et l'Amérique, en plus de la fertilité de son sol, fût le point de départ du développement économique de cette région.
On y cultivait le blé, la canne à sucre, le pastel, l'orseille (substance colorante directement extraite de certains lichens, à ne pas confondre avec l'oseille !), la vigne et plus tardivement la patate douce, le maïs, l'igname, le lin et l'orange (en grande partie exportée vers l'Angleterre).
Les orangers, décimés à la fin du XIXè siècle par une maladie, sont remplacés par les cultures du thé, du tabac, de la chicorée, de la betterave à sucre et enfin de l'ananas.

Le patrimoine architectural se caractérise essentiellement par ses églises paroissiales (la paroisse fût créée en 1796).


Carte du Concelho de Nordeste
Le Concelho de Nordeste, longtemps considéré comme la 10ème île des Açores de part son isolement, est situé à la pointe la plus orientale de l'île de São Miguel. Il est limitée au nord-est par l'océan Atlantique, au Sud par le Concelho de Povoação  et à l'Ouest par celui de Ribeira Grande. Jusqu'à la fin de la construction de la voie rapide en 2011 le reliant au centre de l'île, se rendre à Nordeste était considéré par les habitants comme une véritable expédition !
Sa superficie est de 101,5 km2 pour une population totale de 4 937 habitants (recensement de 2011).

9 Villages ou paroisses (ici ce sont des Fréguesias) font partie du Concelho de Nordeste :
Salga (488 habitants), Achadinha (535 habitants), Achada ( 436 habitants), Santana (regroupe Feteira Grande et Feteira Pequeina) (475 habitants), Algarvia (290 habitants), Santo Antonio de Nordestinho (255 habitants), São Pedro de Nordestinho (273 habitants), Lomba da Fazenda (844 habitants) et Nordeste (1341 habitants). 

Même s'il existe une légère différence de température entre la côte Nord et la côte Sud (2 à 3° de moins), le climat reste doux malgré tout, et humide (c'est habituel sur les îles de l'Archipel), avec des précipitations régulières tout au long de l'année rendant les sols fertiles et alimentant les rivières comme celles de Ribeira do Guilherme ou Despe-te-que-Suas.
Le relief de la côte nord est constitué d'un complexe basaltique et de couches d'andésite, autre roche volcanique, présente également dans le massif de l'Esterel et très abondante aux Antilles (Guadeloupe et Martinique). Elle pouvait servir à construire les murs des maisons et des églises.
On retrouve ces formations géologiques sur le plateau des Graminhais (900 m), le Pico Verde (932 m), le Pico Redondo (980 m) et enfin le Pico da Vara (1103 m).

Parmi les activités culturelles, les Fêtes de l'Esprit Saint célébré ici aussi, comme quasiment partout aux Açores.






L’artisanat se distingue par  diverses créations d'objets, essentiellement réalisés à partir d'écailles de poisson, de papier, de coquillages, d'étoffes... feuilles de maïs servant à l'élaboration de paillassons, objets divers en osier, broderies en lin, couvre-lits en patchwork, bonnets de laine, créations de vêtements traditionnels...



Au musée de l'Artisanat de Nordeste existe une "Maison du Travail" où vous pouvez voir des femmes travailler sur des métiers à tisser.

      






L'agriculture occupe près de 50% des terres.

De petites exploitations s'adonnent à la culture d'herbes fourragères, de patates, fèves, haricots, citrons... et à l'élevage de bovins, porcs, chèvres et volailles.



L'autre moitié représente l'espace forestier où abondent cryptomérias (implantés dans la seconde moitié du XIXè siècle), genévriers, lauriers (Nobilis et Azorica, espèces endémiques des Açores). 

Se développent également des activités destinées au tourisme tels que le Golf, le Tennis, la Voile, le Surf, l'Escalade, la Randonnée, sans oublier la plongée, la pêche et l'observation sous marine.


A Nordeste existe aussi le Centre Ambiantal du Priolo, qui fût créé à la base pour la protection et la sauvegarde de ce petit bouvreuil nommé Priolo, qui malheureusement ne se trouve plus que dans ce coin de l'île et uniquement en altitude dans la zone forestière de la Tronqueira, où persistent encore les lauriers dont il raffole. Il se nourrit également de graines, boutons de fleurs, spores de fougères. C'est une des espèces les plus menacées d'Europe.


Coucher de soleil sur Algarvia

May & Esop